Parler de moi, je dois vous avouer que ce n’est pas la chose dont je raffole le plus. Ce doit être mon côté réservé qui ressort. Je suis comme ça depuis tout petit je crois, je ne sais même pas quand est-ce que je me suis réveillé, un jour, pour me dire « bon, je ne parlerai de moi à personne ». En tous les cas, là, tout de suite, maintenant, j’ai plutôt l’impression de m’arracher une dent que de me vider ou me détendre … Ou tout ce genre d’émotions que ce sont sensés ressentir les gens « normaux ». En supposant que la normalité existe … Désolé, je divague un peu, j’ai tendance à me laisser porter par mes sentiments. Je suis un véritable passionné. C’est assez marrant parce que je suis aussi très timide. Pas tant que ça, j’exagère un peu mais, voilà quoi. Je ne suis pas du genre à aborder les autres, ce sont eux qui font le premier pas. A dire vrai, ma timidité, ce serait plus comme de la gêne : je ne suis pas très à l’aise avec les gens que je ne connais pas, mais je pourrais casser la blague pendant des heures avec ceux qui me sont proches. En parlant de proches, sachez que je suis quelqu’un de profondément loyal. Dans tous les domaines, en particulier l’amitié. Parfois, je dirais même que je suis trop honnête, presque à la limite de la naïveté.

Mais bon, malgré mes airs de gentillet, il ne faut pas oublier que l’habit ne fait pas le moine … Je peux être très autoritaire quand je me décide ! Je n’aime pas avoir tort, et ce n’est pas la peine d’essayer de me contredire, j’ai raison et puis c’est tout ! De toute manière, étant quelqu’un d’assez pointilleux et logique, je suis rarement dans le faux. Cela dit, s’il arrive qu’on me contredise, je ne vais pas m’emporter, Dieu m’a fait placide … A bien ou à mal, je ne sais pas. De toute manière, je suis un idéaliste, alors autant dire à bien.

Euh … Mon physique ?Ce n'est que lors des visites médicales que je m’y intéresse un tant soit peu. Il faut dire que j’ai beaucoup plus important à faire que poser mes deux pieds sur une balance ou chercher un mètre pour me mesurer. Hmm … La dernière fois, je crois que le doc’ m’a dit que je pesais 62 kilos pour un bon mètre quatre-vingt … Ou quelque chose dans le même genre. Bah, de toute manière, on s’en fiche un peu quand même. C’est comme pour les vêtements que je porte. Qu’est-ce que ça vous apportera de savoir que j’ai assez de goûts pour pouvoir assortir mes vêtements ? Je ne suis certainement pas au top en matière de mode, mais je ne pense pas m’habiller comme un sac non plus. Et puis, l’essentiel, c’est que je ne me balade pas tout nu dans la rue, non ?

Bref, sinon, pour ne pas faire original, j’ai les cheveux noirs et lisses (même si à l'origine, ils sont plus ondulés qu'autre chose !), comme la quasi-totalité des asiatiques, et des yeux eux aussi noirs. Ou marron foncé, tout dépend de votre seul de daltonisme.

Un jour, mon frère m’a dit que j’étais mignon, et qu’il ne comprenait pas pourquoi je n’étais jamais sorti avec une fille de ma vie. Je lui ai répondu que je n’avais rien de spécial, j’étais peut-être « mignon », mais pas « beau ». L’autre frère, lui, n’a trouvé qu’à dire que j’étais un grand timide. Pff.

Le 13 août 1988, j’ai vu le jour. Pour le dernier enfant qu’elle allait avoir, ma mère ne voulait pas savoir le sexe à l’avance. D’après ce que m’a dit Otou-san, je fus une assez grosse déception pour ma mère : après deux garçons, elle avait espéré avoir une fille. C’est bien dommage pour elle. En tous les cas, je suis content d’être un homme, moins de problèmes. Bref. A cause de cet état de fait, j’ai toujours été beaucoup plus proche de mon père, qui en quelques sorte, comblait le manque d’amour que j’avais par rapport à ma mère. Je pense que mon plus grand regret, c’est ça : ne pas avoir connu ce qu’est le véritable amour venant d’une maman. C’est assez bête tout de même, qu’elle m’en ait voulu pour ça. Mais comme je le disais, femme=problème.
Pendant les premières années de ma vie, elle a été assez distante avec moi et c’était très difficile à vivre, mais plus je vieillissais, plus une sorte d’accord tacite s’installait entre nous : pas de bagarres, juste de l’indifférence. Avec le temps, cela a fini par mon convenir. De toute manière, j’étais bien entouré. Il y avait bien sûr Otou-san, mais aussi Koki et Tatsu-kun. Que dire de ces deux frères ?
Avec Tatsu-kun, ça a toujours été une évidence. Avec nos deux ans d’écart, nous formions un duo inséparable, et il était – et est toujours d’ailleurs – plus qu’un frère, mais aussi un ami, un confident, une épaule sur laquelle se reposer quand ça n’allait pas. Et je pense que je le lui rends bien. Avec Onii-san par contre … Je ne saurais dire. C’était le grand frère quoi. Celui qui nous a protégé, qui a fait son devoir d’ainé. Mais à part ça … Je ne sais pas. Nous n’entretenons pas cette même relation que nous entretenons avec Tatsu-kun. Onii-san me fait un peu penser à Okaa-san. On dirait qu’ils ont tous les deux un problème avec moi. Ca me désole, parce que j’ai toujours admiré Onii-san, mon grand frère … Mais j’ai l’impression qu’avoir une bonne relation avec lui, c’est mission impossible. Pourtant, je ne me rappelle pas avoir fait un jour quelque chose pour le heurter ou quoi … Tatsu-kun me dit de ne pas y faire attention, mais voilà : étrangement, j’accorde plus d’importance à mon frère qu’à ma mère.

Quoiqu’il en soit, je pense que je peux remercier Okaa-san car c’est grâce à elle que je me suis mis au dessin, ou plutôt à cause. C’était une sorte d’échappatoire, un moyen d’extérioriser toutes mes souffrances. Mais bon, au début, je n’ai pas été un vrai Michel Ange. Plutôt un Gribouilli-Boy ! Mais très vite, j’ai eu du talent, et j’ai trouvé mon propre style. Le dessin était devenu une passion. Les mangas, plus particulièrement.
Depuis tout petit, je regarde des dessins animés et lis des mangas, et j’ai rêvé pouvoir faire pareil un jour, de me dire que des milliers de personnes regardent, achètent et aiment mes créations.
Vers mes débuts, je partageais les avec Setsuko et Hiroshi. Setsuko est la fille de mon coeur. Je ne suis pas amoureux d’elle, loin de là, mais c’est ma cousine chérie, celle qui ne me juge pas et qui partage mes passions. Avec elle, la vie est sans soucis ! Avec Hiroshi, c’est un peu la même chose. C’est mon meilleur ami, et je ne le remplacerai pour rien au monde. Nous étions voisins de classe pendant notre deuxième année de collège, et tout comme avec Setsuko, notre passion pour les jeux vidéos et les mangas nous ont rapproché jusqu’à nous permettre de tisser une amitié qui je l’espère, et indestructible. Malheureusement, aujourd’hui, nous n’avons plus beaucoup de temps pour nous voir, mais pour moi, c’est « loin des yeux, près du cœur ». Hiroshi a même été la première personne, après Tatsu-kun, à lire l’un de mes mangas. Mon premier manga qui plus est, que j’avais écrit à l’âge de 13 ans. Je ne saurais décrire l’émotion que j’ai ressentie en achevant la dernière page de ce petit tas de papiers. Le plaisir de la première fois.

Arrivé au lycée, j’ai très vite intégré le club d’art, où il y avait, je dois l’avouer, pleins de gens intéressants. Là-bas, mon aisance avec le dessin s’est encore améliorée, et à la fin de ma première année, je devenais déjà son président ! Quelle fierté. En deuxième année, beaucoup de filles voulurent venir vers moi, mais je crois que ma timidité a eut raison de moi. Ce qui fait que je n’ai jamais eu de petite amie au lycée, même lors de ma dernière année. D’ailleurs, en parlant de dernière année …
Une nouvelle venait d’intégrer le club d’art, Asano Ruri. Elle était toute mignonne, sa timidité était clairement lisible sur son visage. C’était touchant. Je ne sais pas trop pourquoi, mais je me suis pris d’affection pour elle. Je n’étais pas amoureux, non, mais je la couvais un peu comme un grand frère couverait sa petite sœur. Elle avait un bon potentiel, son talent était juste un peu maladroit. Mais ce n’était pas le pire.
Un jour, alors que je marchais dans la cour du lycée, il me semblait avoir entendu des pleurs étouffés venant des vestiaires. Alarmé, je m’y suis rendu et je crois que ce jour-là, fut le seul et unique où je m’étais vraiment emporté. Ce … Ce bakeru (fils de …) était en train d’abuser d’Asano ! Je ne me fis pas prier, et je lui envoyai sans état d’âme mon poing dans la figure. Heureusement que j’avais suivi des cours d’art martiaux … Heureusement, ce gars c’était fait renvoyé quelques temps après. Suite à cela, Asano s’est rapprochée de moi, et j’ai fait tout ce qui était en mon pouvoir pour la détendre, et la rendre moins timide. En tous les cas, mon cœur se serra un peu quand je finis par la laisser seule lorsque je dus quitter le lycée, pour enfin entrer dans mon école de mangaka.

Je n’ai jamais été aussi heureux. Dessiner était devenu un mode de vie, et il ne se passait pas une heure de la journée sans que je ne fasse un petit croquis ou quelque chose avec mon crayon. J’adorais ça. C’était presque de la folie tellement j’étais passionné. Je le suis toujours d’ailleurs, contre mon gré. C’est plus fort que moi, je n’arrive pas à me contrôler. Vraiment, j’adore dessiner. Et puis, j’ai fini par me faire connaître, tout ça grâce à un concours auquel mon frère m’avait inscrit. Je n’aurais jamais pensé gagner, mais grâce à cela, j’ai eu une place dans un magazine de prépublication, et ce fut à partir de là que ma carrière fut lancée.

Vivre de ma passion c’est … C’est franchement le plus beau cadeau que m’a fait le bon Dieu. Être connu était un rêve de gamin. S’il y a bien une chose que je n’aime pas actuellement, c’est les conférences de presse et tout ce tintouin. N’oublions pas que je suis assez timide, et ce n’est pas toujours facile de devoir parler devant des caméras. Mais je suis extrêmement fier de voir où mon talent m’a mené.
Cependant … Je ne suis pas encore un artiste accompli. C’est assez bête, mais je n’ai jamais connu l’amour. Je n’ai jamais été amoureux. Peut-être que j’ai peur que les femmes me déçoivent, comme Okaa-san. C’est peut-être psychologique. Ou peut-être que je n’ai pas trouvé la bonne, je sais pas. Le problème, c’est que cette absence de sentiment m’empêche d’être au summum de mon talent. J’ai pourtant demandé à mes frères de me conseiller, de me dire à quoi ça ressemble. Mais ça ne le fait pas, parce qu’il faut que je connaisse ça moi-même. Mais je ne vois vraiment, mais alors la vraiment pas du tout comment je vais faire ça. J’aurais du être plus doué en tchatche. Parce que là, je crois que j’ai encore beaucoup de chemin à parcourir avant de … Trouver l’amour.

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